en braque sur moi, sans trêve, la large gueule menaçante. Je suis là, assis à cette table, heureux et calme, goûtant la tendresse de l’avril revenu encore une fois. La porte s’ouvre, Chavarax paraît. Horreur ! il s’avance sur moi la main ouverte. Avec un infernal sans-gêne auquel il faut bien que je sourie, ne l’osant châtier à coups de botte, il s’affale en un fauteuil, il roule sa cigarette, l’allume, et du même ton ensemble enjoué et respectueux dont il dirait :
« Je viens chercher des ordres »,
il dit :
« Je viens chercher ma place. »
Sa place !… Cette place que je lui ai promise en une minute à jamais exécrée d’aberration et de démence ; cette place que je n’ai pas et que, n’ayant pas, je ne peux pourtant pas inventer, nom de Dieu ! En vain j’essaye des calmants, je répète : « Patience ! Patience ! L’avenir, monsieur Chavarax, est à ceux qui savent attendre. La Direction des Dons et Legs est de personnel limité et les mutations y sont rares. Patientez, et laissez-moi faire ! » Chavarax est impitoyable ! une bouche de marbre me parle par sa bouche. Au mot « patience », il a élevé vers le ciel des yeux voilés de fausses lar-