Page:Courteline - Un client sérieux, 1912.djvu/61

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onsieur. --- Tout l'honneur est pour moi, croyez-le!

Monsieur Ledaim. --- Je suis confus...

Le monsieur. --- Du tout, du tout! -- Vous vous disposiez à prendre une tasse de thé? Voulez-vous me faire le plaisir de le prendre en ma compagnie?

Monsieur Ledaim. --- Comment donc! (A part.) En effet, il est très bien, ce monsieur.

Le monsieur, lui avançant une chaise. --- Asseyez-vous donc, je vous prie... (M. Ledaim salue et s'assoit.) et me contez à quelle circonstance, aussi fortunée qu'imprévue, je dois l'avantage de votre visite.

Monsieur Ledaim. --- Ma foi, monsieur, je serai franc. J'étais au bois de Boulogne, à voir passer le monde, quand tout à coup... (Le monsieur lui verse du thé.) -- Merci, monsieur!... -- des cris de femme attirèrent mon attention. J'accourus...

Le monsieur. --- Quel drôle de quartier!

Monsieur Ledaim. --- Qu'est-ce que vous dites?

Le monsieur. --- Je dis: "Quel drôle de quartier!"

Monsieur Ledaim. --- Vous dites: "Quel drôle de quartier!"?

Le monsieur. --- Oui, je dis: "Quel drôle de quartier!"

Monsieur Ledaim. --- A propos de quoi dites-vous: "Quel drôle de quartier!"?

Le monsieur. --- A propos de quoi je dis: "Quel drôle de quartier!"? Je dis: "Quel drôle de quartier!" parce que c'est un drôle de quartier.

Monsieur Ledaim, très étonné. --- Ah?

Le monsieur. --- Vous n'êtes pas d'ici, peut-être?

Monsieur Ledaim. --- Non, monsieur; je suis de Cancale.

Le monsieur, très courtois. --- Il n'y a pas de sotte patrie.

M. Ledaim sourit et salue.

Le monsieur. --- Eh bien, monsieur, vous ne sauriez croire combien Paris est fertile en inattendus. Ainsi, voilà un appartement situé au coeur même de la ville, admirablement exposé: quatre fenêtres au midi, l'eau et le gaz à tous les étages. Devinez combien je paye?... Treize cents!... Hein? c'est donné!

Monsieur Ledaim. --- J'avoue...

Le monsieur. --- Et notez que les denrées sont d'un bon marché exceptionnel!