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Page:Courtilz de Sandras - Mémoire de Mr d’Artagnan, tome premier, 1700.djvu/404

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à les proteger avoir été ſi malheureux que d’être obligé de reclamer leur protection. Les Anglois qui traitent d’ordinaire ces peuples de Barbares, ne le virent pas plûtôt entre leurs mains, qu’ils réſolurent de l’en tirer. Ils traiterent avec quelques-uns des Principaux qu’ils le leur livreroient moyennant une bonne ſomme d’argent. La choſe s’executa auſſi-tôt, & ce pauvre Prince fut fait priſonnier de ſes propres ſujets. L’on a toûjours attribué la cauſe de ces deſordres à la Politique d’un grand Miniſtre qui avoit beaucoup à cœur la gloire de l’Etat dont l’adminiſtration lui avoit été confiée. Mais ſi cela eſt, il a bien perdu ſon tems, quand il s’eſt efforcé de paſſer pour auſſi homme de bien que grand Politique. Une telle conduite ne répond guéres à ce qui eſt répandu dans quelques livres de pieté qu’il a compoſez : mais peut-être auſſi ne les a-t-il donnez au public que pour lui faire voir qu’il avoit aſſez d’eſprit pour joüer tous les perſonnages qu’il vouloit. Car il me ſouvient qu’il compoſa auſſi une Comedie dans le même tems, & même que le chagrin qu’il eut de ce quelle n’avoit pas le même ſuccés que celles de Corneille, lui fit entreprendre de faire condamner le Cid par l’Academie Françoiſe qu’il avoit établie. Il penſoit apparemment que comme elle lui avoit l’obligation de ſon établiſſement, elle ſe feroit un plaiſir de lui témoigner ſa reconnoiſſance par une complaiſance aveugle ; mais il en arriva tout autrement qu’il ne penſoit, tellement qu’il eut encore le mécontentement de ſe voir tondu de ce côté-là.

Quoiqu’il en ſoit, ſi ce fut une choſe fort extraordinaire que la priſon de ce Prince ; ces Peuples n’en demeurerent pas là : après avoir réſolu d’agir criminellement contre lui, & de le rendre ſoûmis à leurs loix, comme le pouvoit être le moindre d’entr’eux, ils en étoient venus de la penſée aux effets. Cromwel qui s’eſt rendu fameux à toute la poſterité, en s’élevant de la qualité de ſimple Gentilhom-