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pour la langue internationale

vocables pourront être dissociés et représentés par des mots différents, de manière à éviter toute équivoque ; et surtout, on pourra les dépouiller des associations d’idées nées de l’usage populaire, qui en compliquent et en dénaturent le sens. Et puis, il ne faut pas oublier que la L. I. est surtout destinée aux usages scientifiques et commerciaux. Or le propre d’un concept scientifique ou technique, c’est d’être absolument international, c’est-à-dire le même pour tous les esprits sans quoi il ne serait pas objectif et vraiment scientifique.

D’ailleurs, les vocabulaires techniques de chaque science devront être élaborés par des commissions spéciales, qui fixeront le sens de chaque mot et du même coup définiront avec précision les concepts correspondants. Pour la philosophie même, un tel travail a été proposé par plusieurs membres du Congrès de Philosophie, et va être entrepris, pour le français, par la Société française de philosophie récemment fondée. De la comparaison des vocabulaires philosophiques et scientifiques de chaque langue ressortira naturellement un vocabulaire philosophique et scientifique international. Ce travail profitera à la fois à la L. I. et aux sciences elles-mêmes, qui trouveront en elle un organe plus logique, plus clair et plus complet que dans aucune langue nationale.

Grammaire et syntaxe.

Quant à la grammaire et à la syntaxe, elles devront être réduites au strict nécessaire ; et l’on ne se doute pas à quel degré de simplicité et régularité, inconnu de nos langues, elle peut se ramener. La distinction des genres, si embarrassante pour les étrangers, est inutile (sauf dans les pronoms et adjectifs possessifs de la 3e personne, où le genre sera naturel). Les verbes n’ont pas besoin de varier suivant le nombre et la personne, le sujet donnant déjà ces indications. Dès lors, il suffit d’avoir une marque pour le pluriel des noms, quelques affixes pour distinguer les temps et les modes des verbes et pour former les participes ; en tout, moins de vingt désinences ou flexions grammaticales, toutes absolument uniformes et invariables. Plus de déclinaisons, presque plus de conjugaisons, plus de noms et de verbes irréguliers. Une telle grammaire peut être apprise en une heure, et néanmoins elle permet de rendre toutes les nuances de pensée