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Page:Crébillon (Fils) - Le Sopha.djvu/199

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LE SOPHA

— « Ah ! Nasses ! s’écria-t-elle, quel plaisir vous ferait un aveu que vos emportements m’ont déjà arraché ? M’avez-vous là-dessus laissé quelque chose à vous dire ?

— « Oui, Zulica, répondit-il ; sans cet aveu charmant que je vous demande, je ne puis être heureux ; sans lui, je ne puis jamais me regarder que comme un ravisseur. Ah ! voulez-vous me laisser un si cruel reproche à me faire ?

— « Oui, Nassès, dit-elle en soupirant, je vous aime ! »

« Nasses allait remercier Zulica lorsque l’esclave de Mazulhim vint servir ; il en soupira…

« Nassès soupira de se voir interrompu, poursuivit Amanzéi ; ce n’était pas qu’il fût amoureux, mais il avait cette impatience, cette ardeur qui, sans être amour, produit en nous des mouvements qui lui ressemblent, et que les femmes regardent toujours comme les symptômes d’une vraie passion, soit qu’elles sentent combien il leur est nécessaire avec nous de paraître s’y tromper, ou qu’en effet elles ne connaissent rien de mieux. Zulica, qui n’attribuait qu’à ses charmes l’impatience qu’elle remarquait dans Nassès, en avait toute la reconnaissance possible : mais pour soutenir ce caractère de personne réservée qu’elle s’était donné, elle lui fit signe, en lui serrant la main, d’avoir en face l’es-