Et peut former en moi de si tristes accents ?
D'où vient que je frissonne ? Et quel est donc mon crime :
Me serais-je mépris au choix de la victime ?
Ou le sang des romains est-il si précieux
Qu'on n'en puisse verser sans offenser les dieux ?
Par mon ambition, d'illustres destinées,
Sans pitié, sans regrets, ont été terminées ;
Et lorsque je punis qui m'avait outragé,
Mon faible cœur craint-il de s'être trop vengé ?
D'où peut naître le trouble où son trépas me jette ?
Je ne sais ; mais sa mort m'alarme et m'inquiète.
Quand j'ai versé le sang de ce fier ennemi,
Tout le mien s'est ému, j'ai tremblé, j'ai frémi.
Il m'a même paru que ce romain terrible,
Devenu tout à coup à sa perte insensible,
Avare de mon sang quand je versais le sien,
Aux dépens de ses jours s'est abstenu du mien.
Je rappelle en tremblant ce que m'a dit Arsame.
Éclaircissez le trouble où vous jetez mon âme,
Écoutez-moi, mon fils, et reprenez vos sens.
Que vous servent, hélas ! Ces regrets impuissants ?
Puissiez-vous, à jamais ignorant ce mystère,
Oublier avec lui de qui vous fûtes père !
Ah ! C'est trop m'alarmer ; expliquez-vous, mon fils.
De quel effroi nouveau frappez-vous mes esprits !
Mais pour le redoubler dans mon âme éperdue,
Dieux puissant, quel objet offrez-vous à ma vue !
Scène VII.
Malheureux, quel dessein te ramène en ces lieux ?
Que cherches-tu ?
Je viens expirer à vos yeux.
Quel trouble me saisit !
Quoique ma mort approche,