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Page:Crébillon - Théâtre complet, éd. Vitu, 1923.djvu/500

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Que César entretient pour ses lâches desseins.

Philippe

A part.

Quel trouble dans mon coeur élève sa présence !
Ô mes yeux, contemplez : voilà sa ressemblance,
Le port majestueux de cet homme divin,
Qui tout percé de coups vint mourir sur mon sein.
Hélas ! si c’était lui... Mais puis-je méconnaître,
Et les traits et la voix de mon auguste maître ?
Quelle horreur en ces lieux règne de toutes parts ?
Dieux, quel spectacle affreux vient frapper mes regards !

Il s’appuie sur les débris de la statue de Pompée.

Chers débris, monuments de la fureur d’Octave,
Arrosez-vous des pleurs d’un vertueux esclave,
Ou plutôt revivez, triste objet de mes voeux,
Et venez recevoir l’âme d’un malheureux.
Je me meurs.

Tullie

Que dit-il ? et qu’est-ce qui l’arrête ?

Sextus

Avance, à m’immoler ta main est-elle prête ?
Que vois-je ? Quel mortel se présente à mes yeux ?
Grands dieux ! n’est-il donc plus de vertus sous les cieux ?
L’erreur qui me flattait malgré moi se dissipe :
Qui m’eût dit qu’à regret je reverrais Philippe ?
Ce fidèle affranchi du plus grand des mortels,
Qui semblait avec lui partager ses autels,
Que ses derniers soupirs avaient couverts de gloire,
Ce Philippe autrefois si cher à ma mémoire,
Qui sut de la vertu m’aplanir les chemins,
Philippe est devenu chef de mes assassins.
Tu pleures, coeur ingrat ! Que de torrents de larmes,
Il faudrait pour laver tes parricides armes !
Va, comble tes forfaits ; si tes barbares mains
N’ont point assez trempé dans le sang des Romains,
Viens, cruel, dans le mien anoblir ton épée ;
Plonge-la dans le sein du malheureux Pompée.

Philippe

Ah ! Sextus !

Sextus

Serais-tu capable d’un remords ?

Philippe

Écoutez-moi, mon maître, où me donnez la mort ;
Daignez vous rappeler l’histoire de ma vie,
D’aucun crime jamais elle ne fut flétrie.

Sextus