Page:Crébillon - Théâtre complet, éd. Vitu, 1923.djvu/513

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Nous le verrons bientôt disputer avec nous
Un fardeau dont le poids ne paraît que trop doux ;
Mais je saurai bientôt prévenir son attente ;
Immolons à la fois Sextus et son amante.
Heureusement Tullie est encor dans nos mains,
Et de Rome, son père a repris les chemins ;
Bientôt Herennius qui devait l’y conduire,
De son sort, quel qu’il soit, aura soin de m’instruire ;
Mais Mécène paraît.


Scène II

Octave, Mécène.
Octave

 Cher ami, que mon coeur
Avait besoin de toi pour calmer ma douleur !
Philippe m’a trahi : cet esclave infidèle,
Que je croyais si sûr et si rempli de zèle,
Par ses fausses vertus abusant mes esprits,
Était d’intelligence avec tous les proscrits ;
C’est lui qui les a tous sauvés de ma poursuite,
Et qui seul de Sextus a préparé la fuite.

Mécène

Philippe n’a jamais mieux rempli son devoir,
Qu’en trompant votre haine et votre fol espoir ;
Et d’ailleurs devait-il vous livrer son élève ?
À ce nom si chéri, déjà l’on se soulève.
Si par malheur Sextus fût resté dans vos mains,
Vous eussiez contre vous armé tous les Romains.
Mais n’êtes-vous point las de tant de barbarie,
Et d’exercer ici l’empire des Furies ?

Octave

Qu’entends-je ?

Mécène

Les discours d’un ami vertueux,
Dont vous approuveriez le zèle impétueux,
Si de quelque retour votre âme était capable ;
Mais aux cris comme aux pleurs, elle est impénétrable.
Vous ne serez que trop entouré de flatteurs,
Et que trop inspiré par de vils délateurs :
C’est l’unique entretien où vous trouviez des charmes.
Je ne puis plus vous voir sans répandre des larmes.
L’ami que j’avais cru digne d’être adoré,
C’est le même par qui je suis déshonoré ;