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poésies.


Bientôt apparaissaient du nouvel hémisphère
Les rivages, baignés dans des flots de lumière ;
Alors Démerary s’offrait à son regard.
Transporté sur ces bords des rives hispaniques,
Le malheur le faisait, sous le ciel des tropiques,
Le défenseur du Léopard.

Démerary passait ; une terre nouvelle…
Mais ce long rêve ici, miroir toujours fidèle,
Se fondait tout à coup dans la réalité.
Ce ciel pur et serein, ces splendides montagnes,
Ce fleuve grandiose et ces vertes campagnes,
Fières de leur fécondité,

Montmorency roulant sa vague mugissante,
Le clocher dans le ciel jetant sa voix vibrante,
(Du Français, du chrétien ô souvenirs pieux !)
Étaient là comme au jour où, saluant des frères,
Il trouvait sur nos bords et la foi de ses pères
Et la langue de ses aïeux.

Des glorieux combats où passa sa jeunesse
Ainsi le rêve encor lui redonnait l’ivresse,
Et, de ses premiers jours rallumant le flambeau,
En versant dans son cœur une pure allégresse,
Venait illuminer son heureuse vieillesse
Des feux plus doux de son berceau.

Rêve ! baume divin, voix d’en haut, bien céleste !
Du bonheur de l’Éden touchant et dernier reste !