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journal du siège de paris.

cette canaille-là. Dans trois ans je serai prêt et armé jusqu’aux dents. Tu me déclareras donc la guerre en 1870 et tu te laisseras battre. Je prendrai Paris et je te promets que je dompterai si bien tes républicains qu’ils ne remueront ni pieds ni pattes pendant trente ans. Je te ramènerai aux Tuileries et tu me donneras l’Alsace et la Lorraine pour ma peine. Et voilà !… » Aujourd’hui le conseil de guerre a condamné à mort cinq soldats de la ligne qui avaient déserté le champ de bataille à la première affaire de Châtillon. Ce vieux cri : Ce sont les jésuites ! continue à trouver un écho dans les faubourgs. Si le gouvernement ne donne pas la commune, c’est la faute aux jésuites. Le général Trochu, catholique sérieux comme tous les Bretons, va à la messe le dimanche. Donc il est vendu aux jésuites, qui régnent par lui à l’Hôtel de Ville et vont bientôt enchaîner le pauvre peuple. Comme la vérité, la stupidité est, hélas ! immortelle.

Mardi soir, 11 octobre. — Beau soleil, mais l’air est froid. Comme opérations militaires, toujours la même chanson. Canonnade par-ci, fusillade par-là, en somme rien de sérieux. Le gouvernement vient d’abolir le cautionnement des journaux. Je doute de l’opportunité de cette mesure. Maintenant que le timbre et le cautionnement n’existent plus, le premier drôle venu pourra, s’il vous en veut, fonder un journal seulement pour ruiner votre crédit ou votre réputation, et, son œuvre accomplie, discontinuer la publication de la feuille qui aura peut-être empoisonné votre vie.