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octave crémazie

être bien abandonné du ciel pour n’avoir jamais, par ses conseils ou ses exemples, empêché son frère de commettre une faute, peut-être un crime. Le duo des élus et des damnés est assez difficile à faire. Le chant des maudits éternels va assez bien, mais celui des élus offre plus d’obstacles dans son exécution. L’homme, rempli de beaucoup de misères, comprend facilement les accents de la douleur et du désespoir ; mais le bonheur lui est une chose tellement étrangère, qu’il ne sait plus que balbutier, quand il veut entonner un hymne d’allégresse ; cependant j’espère réussir. Pendant que les morts sont dans le temple, une autre scène se passe au cimetière. Les vers, privés de leur pâture, s’inquiètent. Ils montent sur la croix qui domine le champ du repos et regardent si leurs victimes ne reviennent pas. Un vieux ver, qui a déjà dévoré bien des cadavres, leur dit de ne pas se faire d’illusions, que tous les corps dont les âmes pardonnées monteront ce soir au ciel, deviendront pour eux des objets sacrés qu’il ne leur sera plus permis de toucher. Il y a là un chant des vers qui devra joliment bien horripiler M. Thibault. Revenons à l’église. La miséricorde divine, touchée par les prières des bienheureux et par celles des vivants qui sont purs devant le Seigneur, abrège les souffrances du purgatoire, et, s’élançant sur l’un des caps du ciel, un archange entonne le Te Deum du pardon.

« Voilà, en peu de mots, mon poème dans toute sa naïveté. Ce n’est pas merveilleux, mais, tel qu’il est, je