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LA CHANSON DE FORTUNIO


Un jardin. — A gauche, un pavillon en pan coupé, avec perron et balcon. — A droite, la grille d’entrée.



Scène PREMIÈRE

MAITRE FORTUNIO, seul au parterre, à droite ; il compte les roses de ses rosiers.

Deux… quatre… six… huit… dix roses de moins à mes rosiers, et un bouquet de plus sur la fenêtre de ma femme… Très-bien !… (Il inspecte les allées.) Un… deux… trois… quatre… cinq… cinq pas en avant, cinq pas en arrière, dans cette allée que j’ai ratissée moi-même hier !… Piétinement à la même place dans la plate-bande…, impatience !… inquiétude !… Ici, les traces sont plus profondes !… attente !… rêverie !… Il y a un amoureux !… jour de Dieu !… soyons calme !… Très-bien !… (Il descend vers le public.) Il était une fois un garçon de quinze ans, beau comme les amours, amoureux comme le printemps !… et sacripant à dire d’expert !… Ce garçon, c’était moi, oui mesdames, c’était moi. Il y a trente-cinq ans de cela ! J’étais second clerc de maître André, le notaire, et sa femme m’appelait son petit Fortunio. — Rien ne me résistait, grâce à mon talisman, une chanson qui me fit aimer d’elle… et de bien d’autres et qui devint célèbre dans son temps. (Fredonnant.)

––––––Si vous croyez que je vais dire…

Malheureux ! si on m’entendait ! aujourd’hui, hélas ! le clerc mignon est devenu gros notaire ! mais Dieu merci ! la chanson est