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JACQUES PELETIER


1517 — 1582



Peletier, à peu près inconnu aujourd’hui, a joué dans son temps un rôle remarquable et exercé la plus grande influence. Son action, de même que sa vie et son talent, s’explique par une série de contrastes qui sont curieux à observer en lui. C’est une intelligence froide et un esprit chaleureux ; il a le jugement méthodique et le caractère ardent ; il est réfléchi et enthousiaste, à la fois compassé et aventureux.

Toute son existence est basée sur le développement parallèle de ces antithèses. Il fut un célèbre algébriste, et le seul genre poétique pour lequel il me semble né, c’est la Pastorale ; son œuvre lyrique ne se comprend bien que comme un mélange de ces deux tendances, l’une géométrique, l’autre bucolique. Il est par-dessus tout un mathématicien, et sa plus grande gloire, dans notre histoire, c’est de pouvoir être considéré comme le législateur d’une école poétique. Nous avons préparé le lecteur à cette dernière bizarrerie. Il est logique qu’un mathématicien remplît l’office de maître-professeur dans une telle école : afin d’accomplir cette destinée que nous avons dit être sienne et qui consistait surtout à défendre, à émonder, à régulariser la langue française, il lui fallait, à cette école, pour directeur non pas un poëte, mais un architecte.

Peletier ne se borna pas d’ailleurs à donner le résumé des efforts tentés sous François Ier, sa réflexion aventureuse s’élançait vers l’avenir, et il est aussi un des docteurs de la Pléiade.

Par son style, il est l’ami de Mellin, de Bonaventure, de Salel, de Fontaine, de Chapuis, et quand, dans son Art poétique, il nous dit que la clarté doit être préférée à tout, qu’il faut être poëte sans doute, mais surtout poëte français, il tend la main à Marot. Mais lorsqu’il s’inquiète tant de ce qu’il appelle la vraie harmonie musicale ; quand