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DE LA MARQUISE DE CRÉQUY.

sous un prétexte d’interrogatoire ou de confrontation, enfin sous un prétexte quelconque ; elle proposait de laisser évader la Reine au moyen d’un déguisement qui serait aisément fourni par elle, attendu qu’elles changeraient d’habits : Mme  de Janson prendrait sa place au cachot ; on dirait que la prisonnière avait été si parfaitement bien déguisée qu’on n’avait pu s’y reconnaître, et toutes les vengeances de la Convention se trouveraient accumulées sur Mme  de Janson qui promettait de mourir sans parler, et qui du reste, avait une telle ressemblance avec la Reine qu’il était aisé de s’y méprendre. Chabot s’était laissé pratiquer ; mais la Reine y mit un refus persévérant, une résistance invincible, et cette grande Princesse ne voulut jamais accéder à la proposition de Mme  de Janson ; généreuse personne, à qui je n’ai pas toujours eu la satisfaction de voir accorder la justice et l’approbation qui lui revenaient à si juste titre !

La Reine avait écrit définitivement ce qui suit, moyennant des piqûres d’aiguille sur un morceau de papier : Je ne dois ni ne veux accepter le sacrifice de votre vie. Adieu. Adieu.

M. A.

Chabot, qui avait reçu pour environ cent mille francs de louis d’or, et qui craignait que le secret n’en fût divulgué, s’empressa d’aller dénoncer Mme  de Janson, ainsi que Michonit et Jobert qu’il accusa d’avoir entrepris de le corrompre et qui furent condamnés à mort au mois de novembre 1793 ;