devant, c’est-à-dire en pleine famine, au milieu d’une lande à perte de vue, qui n’est ombragée que par des halliers d’épine et de l’ajonc pour tout combustible, avec des grenouilles en eau bourbeuse et force couleuvres en fait de gibier. On n’y mange aucun autre fruit que des mûres de ronces, et le Prince de Ligne ajoutait que les notables du pays se convient toujours obligeamment et délectablement quand ils ont pu se procurer un beau chat. Comme il était co-Seigneur de la ville, il en avait su mille pauvretés de cette nature.
Je ne vous reparlerai pas des noyades de Nantes et des mariages républicains sur les bateaux à soupapes, attendu que les poursuites et l’instruction judiciaire qui ont été dirigées contre Carrier, n’ont pas manqué de mettre à nu tous ces actes de vertige infernal et d’épouvantable férocité que vous trouverez étalés dans son procès.
Les envoyés du comité de salut public à Toulon s’y montraient les dignes émules du même Carrier et de Collot d’Herbois. Ces délégués de la justice conventionnelle avaient fait afficher une proclamation pour enjoindre, sous peine de mort, à tous les propriétaires et les armateurs de Toulon de se rendre au milieu d’une esplanade aux portes de cette ville, et c’était, disaient les signataires de l’affiche, afin de leur communiquer un acte officiel et des résolutions dictées par un esprit de bienveillance et de conciliation patriotiques. Il y fut environ trois mille personnes, et sur un signal donné par le général Fréron, il y eut une batterie démasquée qui tira sur elles à mitraille. On supposa qu’il pouvait