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DE LA MARQUISE DE CRÉQUY.

dance qu’on l’accusait d’entretenir avec des agens de nos princes et du cabinet britannique. Elle y parut toute éclatante de pureté civique et de fierté républicaine ; elle y parla d’une manière si conventionnelle, et se défendit avec une confiance si courageuse et si mâle, qu’elle fut invitée, par acclamation des représentans du peuple, à prendre part aux honneurs de la séance et qu’elle y reçut l’accolade fraternelle du président. Ce ne fut pas là, sans doute, un médiocre sujet d’envie pour la citoyenne Chaumette et la citoyenne Danton ! Quelques mois s’écoulèrent encore, et Mme  Roland fut incarcérée dans les prisons de l’Abbaye.

Dans le temps de leur pouvoir, et peu de jours avant leur mise en accusation, son mari avait fait retrancher 3 francs sur 5, alloués jusque là pour la dépense et l’entretien de chaque prisonnier. Réduits à 2 fr. par jour, il leur était impossible de vivre après avoir acquitté les frais de conciergerie, et la providence a permis que ce fût la femme de Roland qui nous en ai fait la remarque après en avoir fait l’expérience.

Elle adressait incessamment lettres sur lettres et pétitions sur réclamations, les unes à la Section de l’unité, les autres au Comité de sûreté générale, à la Convention, à la Commune ; elle écrivait au ministre Garat, au ministre Gohier ; à celui-ci qu’il avait pris place entre le crime et le déshonneur ; à celui-là que la postérité le couvrirait d’infamie ; que l’épouse du vertueux Roland leur envoyait ses adieux comme un vautour pour ronger leur cœur, etc. Sa longue épître à Roberspierre est véritablement un acte de