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SOUVENIRS

étions lui fit une grande impression, et je vis sur son visage un sentiment d’horreur de ce rapprochement avec tous les événemens qui se passaient. Il dit un mot tout bas à M. Hardy, lui recommanda de me conduire où je demandais à aller et disparut.

« Pendant le chemin, je ne parlais que de ma Mère ; je demandai si elle était encore en prison ; je voulais aller la rejoindre si elle y était encore ; je voulais aller moi-même plaider son innocence. Il me paraissait affreux que ma Mère fût exposée à la mort à laquelle on venait de m’arracher : moi sauvée, ma Mère périr ! cette pensée me mettait hors de moi.

« M. Hardy chercha à me calmer, me dit que j’avais pu voir que depuis le moment où il m’avait séparée d’elle, il n’avait été occupé que du soin de me sauver ; qu’il y avait malheureusement employé beaucoup de temps, mais qu’il se flattait qu’il lui en resterait encore assez pour servir ma Mère ; que ma présence ne pouvait que nuire à ses desseins ; qu’il allait sur-le-champ retourner à la prison et qu’il ne regarderait sa mission comme finie que lorsqu’il nous aurait réunies ; qu’il me demandait du calme, qu’il avait tout espoir.

« Il me laissa remplie de reconnaissance pour le danger où il s’était mis à cause de moi, et avec l’espérance qu’il sauverait ma Mère de tous ceux que je craignais pour elle.

« Adieu, ma chère Joséphine ; je suis si fatiguée que je ne puis plus écrire, d’ailleurs ma Mère me