Leczinska. Il est bon de vous dire que, faute de robes comme on en aurait mis autrefois ; ou comme on en porte aujourd’hui, j’étais habillé comme à mon ordinaire, c’est-à-dire avec ma jupe et mon grand casaquin de taffetas carmélite, ayant le coqueluchon du même avec la mantille pareille. On lui annonça la citoyenne Créquy, et me voilà tête à tête avec le conquérant des Pyramides.
Il me regarda pendant une ou deux minutes avec un air de méditation qui finit par avoir un faux air d’attendrissement. Ensuite il me dit avec une expression que j’appellerais presque filiale. — J’ai désiré vous, voir, Madame la Maréchale…, mais, il reprit tout aussitôt d’un air capable et passablement impertinent. J’ai voulu vous voir. Vous avez cent ans.
— Pas tout-à-fait peut-être ; mais j’en approche beaucoup.
— Quel âge avez-vous au juste ?
— Il me prit envie de rire à raison d’une interrogation pareille et surtout à cause de sa forme impérative.
— Monsieur, lui répondis-je en souriant. (comme on peut sourire à mon âge, hélas ! et peut-être ne s’aperçut-il pas que je souriais), je ne saurais vous dire au juste mon âge. J’étais née dans un château du Maine…
— Ah ! oui, dit-il en m’interrompant brusquement, de votre temps les registres de l’état civil étaient mal tenus ou même n’existaient pas. Et puis il reprit sèchement en forme d’interrogatoire et comme aurait fait un juge d’instruction :