Page:Créquy - Souvenirs, tome 9.djvu/16

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et mon tour de rôle au 31 décembre de je ne sais plus quelle année, par exemple ? mais ce devait être sept ou huit ans avant 89, car nous étions encore en petits paniers, et je vois d’ici nos petites robes de Batavia mandregore et blanc. (Rien n’était si joli que ces robes flambées !)

J’étais donc à l’Élysée-Marbœuf et dans la serre chaude, en tête-à-tête avec cette chère femme qui buvait de l’eau de pommes, et qui déraisonnait sur le rhume, le catharre, les bronches et les tubercules, au point de m’en impatienter. On vient lui dire que madame… (un nom qui semblait inouï) était débarquée dans son antichambre afin de lui souhaiter une bonne année.

— Que le bon Dieu la bénisse et me délivre de sa visite ! Dites donc que si je reste à l’Élysée c’est pour ne recevoir personne et parce que je ne fais que tousser. Pourquoi vient-elle me relancer jusqu’à l’Élysée ?… – est-ce que je ne vous ai jamais parlé de cette madame bonne ou mal à parté ?…

— Malaparté, vous dites ? je crois que c’est Bonaparté, plutôt… et pour ne savoir que nous dire elle se mit à me faire écouter que c’était une femme de condition soi-disant, passablement belle, infiniment pauvre, avec qui son mari, M. de Marbœuf, s’était lié de connaissance en assez grande familiarité pendant qu’il était gouverneur de Corse[1]. Mme  de

  1. Il y a quelques années que M. Louis Bonaparte, ex-roi de Hollande, a publié les mémoires de sa vie, et l’auteur entre en matière en faisant un généalogie pour sa famille, car il serait aussi par trop piquant de ne pas être noble après avoir