Page:Créquy - Souvenirs, tome 9.djvu/6

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des fournisseurs ou des employés et des législateurs de la Convention ?) ; l’Abbé Texier s’était réfugié dans l’île Saint-Louis, chez le Vicaire-genéral qui était alors M. de Malaret, parce que l’Abbé de Dampierre avait été rappelé auprès de M. l’Archevêque, afin de s’y reposer après deux années de la plus laborieuse et de la plus périlleuse mission qui fût jamais. J’y trouvai que ces deux messieurs se parlaient avec édification du Marquis de Villette, de sa générosité parfaite à l’égard de tous les honnêtes gens persécutés pendant la terreur, de ses efforts pour sauver la vie de Louis XVI, et surtout de sa fin courageuse. Il était le beau-frère de cet héroïque et malheureux Varicourt, et quand il avait vu que la révolution tournait au crime, il paraît que cet homme était grandi de cent pieds. C’était chez lui qu’on avait caché presque tous les vases sacrés de nos paroisses, et c’était peut-être bien dans cet appartement où mourut Voltaire ? Cette même chambre aura peut-être servi de refuge à la Croix, de tabernacle à l’Eucharistie ? stat crux dum volvitur orbis

Ces deux messieurs me dirent aussi que les régicides avaient conçu contre M. de Villette une telle rage, cause de son vote en faveur du Roi, que lorsqu’on vint le chercher pour le conduire au supplice, qu’on apprit qu’il venait d’expirer dans son lit, les envoyés du comité de salut public eurent la barbarie de le faire coutelasser, et de faire déchiqueter son cadavre… Il avait un correspondant royaliste appelé M. Coquerel, qui demeurait auprès de Boulogne-sur-Mer ; et c’était à lui qu’il adressait tous les pauvres prêtres et les autres proscrits qui