Page:Crawford - Insaisissable amour, av1909.djvu/180

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le passé était séparé du présent par une barrière qu’il serait difficile de renverser.

Crois-tu que tu pourras jamais aimer encore ? demanda-t-elle au bout de quelque temps en le regardant en face.

— Non, répondit-il en évitant ses yeux. Je n’aimerai jamais aucune femme… de la même manière, » ajouta-t-il après un temps d’arrêt.

Quand il la regarda, elle était très pâle. Il se souvint tout à coup comment elle avait changé de couleur et fondu en larmes quelques semaines auparavant, assise devant lui à cette même place. Quelque chose se passait dans son esprit qu’il ne comprenait pas. Il était très lent à s’imaginer qu’on pût l’aimer. Il était même si loin de le penser dans le cas présent, que tout à coup il lui vint à l’esprit qu’elle pouvait avoir plus d’affection pour Constance Fearing qu’il ne l’avait cru ; qu’elle était peut-être son amie, comme Totty, et que toutes deux l’avaient amené à leur maison de campagne dans l’espoir d’apaiser son ressentiment, de raviver ses espérances, et de lui faire renouer des relations avec la jeune fille qui l’avait refusé. Cette idée était ingénieuse dans sa folie, mais elle excita facilement sa colère.

« L’aimes-tu donc beaucoup, elle, Mamie ? » demanda-t-il en fronçant ses épais sourcils et d’une voix rude.

Le sang monta au visage de la jeune fille et ses yeux lançaient des éclairs quand elle répondit : « Moi… Je la hais ! »

George resta complètement atterré. Cette première explication de la conduite de Mamie s’était si soudainement présentée à lui qu’il l’avait acceptée comme bonne, sans essayer de la raisonner. Or elle était détruite en un instant par la réponse de