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ses facultés et que l’acte était des plus valables. Consciencieux comme il l’était, s’il avait cru que Craik n’était plus sain d’esprit, il eût réclamé immédiatement le témoignage du médecin. Mais il était évident que Craik avait toute sa tête. Si le malade mourait, la chose était irrévocable. Sherry et Totty Trimm n’habiteraient jamais la somptueuse maison dont ils avaient si souvent parlé.

« Pas même la maison !… se murmura-t-il en lui-même tandis qu’il descendait l’escalier. Pas même la maison !… »

Il ne tenait du reste pas à un legs. Quelques milliers de dollars n’étaient pas une affaire pour lui et il différait de sa femme en ce sens qu’il n’aimait pas l’argent. La totalité ou même la moitié de la fortune de Craik, ajoutée à ce que le couple possédait déjà, n’aurait produit dans leur vie que la différence entre le luxe et la splendeur ; mais il attachait une réelle importance à la possession de la maison avec ce qu’elle contenait. Il se pouvait que Tom Craik se rétablit et fit un troisième testament. Trimm savait par expérience qu’un homme qui a changé d’avis une fois, peut en changer une douzaine de fois s’il en a le temps. Mais Craik était très malade et il paraissait peu probable qu’il se remît jamais sur pieds.

Trimm avait été très au courant des affaires de son beau-frère pendant les vingt dernières années et il était moins surpris que bien des gens l’eussent été de la façon dont il venait finalement de les terminer, avant de quitter la vie. Il savait mieux que personne que Craik n’avait pas aussi mauvais cœur qu’on le croyait généralement, et qu’à mesure que cet homme vieillissait il éprouvait de violents accès de remords quand il pensait à Jonah Wood. Il haïssait Wood, il est vrai,