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et d’ailleurs, je crois qu’il s’est aperçu qu’il ne me plaît pas… il vient donc uniquement pour te voir. Tu le reçois, tu lui souris, tu causes avec lui, tu t’intéresses à tout ce qu’il fait… Je t’ai même entendue lui donner des conseils l’autre jour. N’est-ce pas là du flirtage ? Il est amoureux de toi, ou fait semblant de l’être, ce qui est la même chose, et tu l’encourages.

— Il fait semblant ?… Pourquoi ferait-il semblant ? »

Constance faisait ces questions d’un air un peu rêveur, comme si elle se les posait à elle-même et en connaissait presque la réponse. Grâce se mit à sourire.

« Parce que tu en vaux tout à fait la peine, répliqua-t-elle. Te figures-tu qu’il viendrait aussi souvent si tu étais pauvre comme lui ?

— Ce que tu dis là est peu charitable, » observa Constance en reprenant son livre.

Il y avait très peu de surprise dans son ton, cependant, et Grâce fut bien aise de le constater. Sa sœur était moins naïve qu’elle ne l’avait supposé.

« Peu charitable ! s’écria-t-elle. Qu’est-ce que la charité a à voir là-dedans ? Crois-tu que M. Wood vient ici par charité ? Il veut t’épouser, ma chère. Comme ce mariage est impossible, il faut donc que tu le congédies.

— Si je l’aimais, je l’épouserais.

— Oui, mais tu ne l’aimes pas. D’ailleurs, c’est absurde ! Un homme sans situation de famille, sans fortune, surtout sans profession.

— La littérature est une profession.

— La littérature,… oui. Évidemment. Mais ses malheureux petits articles ne sont pas de la littérature. Pourquoi n’écrit-il pas un livre, ou n’entre-t-il pas dans un journal ?