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Page:Crevel - Babylone, 1927.djvu/39

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fauteuil d’acajou et velours rouge est devenu la coque d’un navire, à la suite de leur éblouissant sillage.

Vaisseau fantôme docile aux doux flux et reflux du silence, votre voyage, ce miracle entre ciel et terre, s’achève quand sur les jardins ridicules, tombe la nuit. Alors, l’enfant navigatrice sait que le mieux est d’accoster au sol habituel, d’abandonner le salon de l’après-midi, ses golfes à merveilles, pour le jardin banal des hommes, ses allées, ses pelouses que l’obscurité, lentement, régénère.

Bientôt les vieilles dames auront quitté leurs terrasses, suivies des domestiques porteurs de tables à ouvrage, et la grand-mère elle-même sera rentrée. Point ne sera besoin qu’elle fasse le tour, sept fois, d’une prison, pour que des murs qui s’étaient grands ouverts au sourire infini des flots, à l’inverse de ceux de la cité biblique, se reconstruisent, et de pierres si inexorablement jointes, que nulle Cynthia, nul revenant léger ne sauraient se glisser. Dehors, l’obscurité, cette revanche, d’un peuplier aura fait une volière à chansons, et par la douce grâce d’une pénombre, illimitées seront les routes, les espoirs de l’heure. Le vent, le vent, enfin…

Le vent…