Page:Crevel - Le Clavecin de Diderot, 1932.djvu/153

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Ce n’est point simple hasard, ce n’est point rencontre fortuite au jardin des symboles, si, dans le premier film de Bunuel et Dali et sur plusieurs toiles de Dali, ressuscite le clavecin de Diderot, sous forme d’un piano qui a toutes ses dents et tous ses nerfs et offre son clavier au délire de Guillaume Tell et de ses compagnons, sa caisse à l’éclosion d’incroyables fontaines, et surtout, son dos à l’étalage des ânes pourris et ses chevilles impitoyables aux cordes étrangleuses de frères ignorantins.

De toute sa force, de la seule force de ses sentiments et de ses muscles, le héros du Chien andalou traîne ce fardeau pathétique et vengeur, à travers un appartement, on ne peut plus quotidien.

Clavecin sensible : les encyclopédistes dans leur immense entreprise, au cours d’un siècle de bouts-rimés, n’ont cessé de témoigner du véritable esprit poétique, d’un esprit qui voulait faire quelque chose, fit quelque chose, puisqu’il prépara la chose à faire la Révolution , et ainsi, fut digne de l’étymologie de son admirable qualificatif poétique du grec poiein, faire.

La poésie faut-il encore répéter qu’elle n’a rien à voir avec ces chants plus ou moins heureusement rimés ou rythmés qui flattent les choses et les êtres bien en place et les laissent à leurs places ?