Page:Crevel - Le Clavecin de Diderot, 1932.djvu/89

La bibliothèque libre.
Cette page n’a pas encore été corrigée

lui, au contraire, de sa chasteté, de ses supplices, glorifie son père[1].

Or, en véritié, ce dont il meurt, c’est d’amour pour son père.

Lui, petit lambeau de sentimentalités diaphanes, il s’estime assez peu pour accepter de souffrir, en l’honneur du mâle, son principe congestionné d’omnipotence. Manière de voir qui, du reste, coïncidant avec celle du jus Romanum, donc, devait singulièrement aider au triomphe du christianisme, dans une cité, où les pères avaient droit de vie et de mort sur leurs fils.

Épris de ce que le père incarne de brutal, le fils fait tout son possible, pour en arriver, par les méandres évangéliques, à subir les brutalités des exécuteurs de la volonté impériale, cette volonté impériale ayant été, au préalable,

  1. Cette réciproque passive du complexe d’Œdipe, depuis que Dali a ressuscité Guillaume Tell, tout comme Freud ressuscita Îdipe, pourrait s’appeler complexe de Guillaume Tell. Le sylvestre personnage conserve tout son sang-froid, pour jouer avec une pomme sur la tête (autant dire avec la tête) de son fils. Et ce fils se prête à ce petit jeu, d’aussi bonne grâce qu’Isaac suivit son père Abraham au bûcher et Jésus consentit à la crucifixion. Par ailleurs, en épilogue au complexe d’Œdipe, Antigone ne se sacrifie-t-elle point à son père aveugle. Elle n’a plus d’yeux que pour cet aveugle.