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Page:Crevel - Mon corps et moi (3e édition), 1926.djvu/115

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même le martyrise un peu. Au reste le nègre est un gaillard à faire jaillir des chairs qui lui sont livrées des bouquets d’expressions, ce qui d’ailleurs ne l’empêche point de mériter lui aussi quelques reproches. Sa figure est trop fine. Quant au corps il semble d’un bois précieux et verni. Il est très beau et pourtant je n’ai pas envie de le toucher. Il ne doit être ni chaud ni froid. Je ne saisis pas les moments de sa respiration. Végétal ou minéral. Pas animal. Ses muscles habitent une peau insensible. Protégé de la douleur, il ne doit rien connaître de la volupté. Je le préférerais mafflu, le visage orné de lèvres au grain rugueux, et un museau, non, un groin en guise de nez.

Pour sa couleur, je la voudrais celle même de la boue, dans le voisinage des usines à gaz, en plein été, immédiatement après l’orage.

C’est toujours la même histoire : sous prétexte de civilisation il faut vivre au milieu