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Page:Crevel - Mon corps et moi (3e édition), 1926.djvu/158

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Déjà les herbes se font plus hautes.

Des fleurs touchent mes genoux.

Ma chemise glisse.

Une épaule, un bras entier s’offrent à tout ce bleu du ciel.

J’ai honte de ce qui me reste de vêtements.

Belle vengeance. Si longtemps mes habits durent mépriser le corps que je leur offrais.

J’arrache ma chemise.

Ma poitrine va-t-elle s’ouvrir, ruche enfin soumise aux abeilles du bonheur ?

Et soudain je comprends pourquoi les pâtres de tous les temps demeurèrent attentifs aux insectes, aux cigales, à l’obstination bourdonnante des champs. Il faut être docile. Dans les villes mes pieds prisonniers du cuir s’obstinaient à quelque vengeance. Toute ma peau exilée s’exaspérait jusqu’à ne plus savoir, après l’attente des jours, utiliser pour le plus grand bonheur nocturne quelque autre peau dont la recherche avait compliqué les