Page:Croiset - Histoire de la littérature grecque, t1.djvu/125

La bibliothèque libre.
Cette page n’a pas encore été corrigée

THAMYRIS 75

fois à Delphes et à la Thrace : sa mère, la nymphe Argîope, l'avait conçu près du Parnasse ; puis elle avait quitté le pays, et lui avait donné le jour chez les Odryses*. S'il faut traduire ceci en langage his- torique, il est difficile, ce me semble, de ne pas l'in- terpréter ainsi : Thamyris, comme poète, était à la fois un Piérien et un Delphien, Piérien par l'héritage poétique et religieux qu'il avait reçu et qu'il gar- dait, Delphien par les influences apolliniennes que Philammon avait subies avant lui et qui lui furent transmises. Mais la renommée de Thamyris prove- nait surtout de sa rivalité légendaire avec les Muses. C'est dans VIliade que nous trouvons le plus ancien récit de ce curieux épisode, rappelé ensuite par plusieurs écrivains de l'antiquité. On montrait en Messénie, près d'une rivière nommée Balyra, un endroit autrefois appelé Dorion ; c'était là, disait-on, que Thamyris, revenant d'Œchalia (plus tard An- dania), demeure du roi Eurytos, avait rencontré les Muses et les avait défiées de chanter mieux que lui ; vaincu par elles, il était devenu aveugle en expia- lion de sa témérité, et avait oublié son art de chan- teur et de cithariste*. Cette légende atteste d'abord l'introduction très ancienne de la poésie religieuse dans le Péloponnèse. Eurytos d'Œchalia, d'après les traditions, était le contemporain de Néleus, père de Nestor*. Quant au sens de la lutte de Thamyris avec les Muses, il a été généralement interprété d'une manière qui n'est peut-être pas exacte. Le texte homérique nouô représente Thamyris comme venant

��1. Pausan., VIII, 33.

2. Iliade, II, 594 et suiv.; Apollod., I, 3; Strabon, VIII, 25; Pausan., IV, 2.

3. Cela résuite des légendes rapportées par Pausanias, IV, 2.

��� �