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172 CHAPITRE III. — FORMATION DE LILIADE

lions de la poésie épique primitive, on a recueilli des exemples qui ne permettent pas de douter qu'en l'absence de l'écriture certains hommes heureuse- ment doués et spécialement exercés ne puissent composer et retenir un nombre de vers presque prodigieux. D'autre part, on a dû reconnaître que la date de l'introduction de l'écriture en Grèce était fort incertaine ; et en somme, on ne saurait affirmer que les aèdes homériques, pourvus d'une instruc- tion particulière en raison de leur profession même, n'aient pas été en état, sinon d'écrire couramment, du moins d'aider leur mémoire par un système de signes, deux siècles peut-être avant le commence- ment des Olympiades *. Mais si l'on se dégage de ce

��1. En négligeant les traditions fabuleuses des Grecs sur l'ori- gine de leur écriture, dont ils attribuaient l'invention ou Tintro- duction soit à Orphée, soit à Musée, soit à Linos, soit à Palamède, on ne peut laisser entièrement de côté le témoignage d'Hérodote (Y, 58-60). D'après cet historien, les lettres phéniciennes auraient été importées en Grèce par Cadmos, puis modiGées peu à peu dans leur forme; les Ioniens se les seraient appropriées les pre- miers et en auraient fait usage pour écrire sur des peaux pré- parées. Les plus anciennes inscriptions grecques connues sont celles de Théra : quelques-unes d'entre elles semblent remonter au IX* siècle, ou tout au moins à la première moitié du viii«; elles sont donc antérieures aux Olympiades. Il est clair que l'écriture elle-même doit être notablement plus ancienne en Grèce que ces vieux monuments : des inscriptions n'ont de raison d'être qu'autant que la connaissance de l'art d'écrire est déjà assez répandue. D'ailleurs l'alphabet de Théra, bien que très voisin du prototype phénicien, en diffère cependant d'une manière sensible; et ces différences ne s'expliqueraient pas sans un assez long usage antérieur et un oubli plus ou moins prolongé du modèle. Il est donc probable qu'en effet, comme le dit le vieil historien, c'est bien au premier établissement des Phéniciens en Grèce, et particulièrement à la colonie cadméenne de la Béotic, que doit être rapportée l'intro- duction de l'Alphabet parmi les populations grecques. Cf. Lenor-

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