Page:Croiset - Histoire de la littérature grecque, t1.djvu/313

La bibliothèque libre.
Cette page n’a pas encore été corrigée

LA LANGUK DE L'ILIADE 263

due. Elle s'est fait ainsi un langage qu'elle a consacré dès l'origine par son caractère religieux et ensuite par ses succès. Plus tard la grande épopée est née en lonie sur les confins de l'Eolide. Tout naturellement elle a parlé ionien, mais un ionien mélangé d'éolismes que la tradition lui suggérait et que les mœurs acceptaient. Toute l'explication de la langue homérique est dans ces quelques faits. C'est donc une langue composite, mais ce n'est pas un mé- lange arbitraire de tous les dialectes contemporains. Le poète qui la parle a souvent le choix entre plu- sieurs formes, ce qui donne à sa diction beaucoup de souplesse et de variété, mais ces formes ne sont pas prises au hasard entre toutes celles que lui offrait l'usage contemporain; encore moins sont-elles fabriquées par lui artificiellement à l'aide d'allonge- ments ou de raccourcissements ; ce sont ou des formes anciennes conservées par la poésie pour son usage particulier ou des formes contemporaines appartenant au dialecte du poète. Il est donc tantôt volontairement archaïque, tantôt fidèle à l'usage ré- gnant. Sa liberté est grande, plus grande assuré- ment, et de beaucoup, que ne le fut dans la suite en Grèce celle des écrivains de l'âge classique, mais c'est une liberté raisonnée et respectueuse de la tra- dition.

Ce que nous disons ici des formes verbales peut s'appliquer également au choix des mots. Il est visible que les poètes homériques se font une règle constante de ne pas employer le vocabulaire ordi- naire, celui de tout le monde et de tous les jours, afin de donner à leur récit plus de noblesse. Ils mettent en pratique pour cela plusieurs procédés traditionnels fort simples. Comme ils aiment les formes archaïques, ils ont aussi le goût des termes

�� �