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LIVRE XXI 317

des sentiments, qui, sans être passionnés, sont inté- ressants et animés. L'épopée ici, en nous dépei- gnant la vaine présomption des concurrents, la di- versité de leurs défis, et les nuances du dépit qui vont chez eux de l'humiliation à la colère, se rap- proche plus de la nouvelle comédie que de la tra- gédie ; et toutefois l'élément tragique y est forte- ment représenté par le personnage d'Ulysse dont la dissimulation couvre à peine la colère toujours gran- dissante et dont la force vengeresse se révèle déjà. Signalons, comme épisodes, d'abord la scène entre Pénélope et son fils {v. 343-358), déjà rencontrée plusieurs fois dans le poème sous forme d'imita- tions; puis la reconnaissance d'Ulysse par Eumée et Philœtios (v. 188-244), moins pour sa beauté drama- tique — car le poète semble l'avoir un peu sacrifiée — que pour la manière dont elle prévient ce que la scène principale aurait pu avoir de monotone; enfin la description d'Ulysse essayant son arc (v. 404-423), morceau admirable de tout point, qui semblait fait pour servir un jour de modèle soit à un peintre, soit à un sculpteur.

Dès qu'Ulysse a en main cette arme redoutable, le moment de la vengeance est venu. Le vingt- deuxième livre est le récit du combat, qui se ter- mine par un massacre *. Si l'on peut reprocher à l'ensemble quelques longueurs, il est impossible en revanche de ne pas admirer la force d'imagina- tion qui éclate presque partout. La révélation d'U- lysse au début est saisissante, et la façon dont la lutte

��1. Tout y semble primitif, sauf peut-être l'épisode de l'inter- veution du faux Mentor (v. 201-240) et un léger remanicuieut dans les vers 290-291 qui font allusion à Toulrage de Ctésippe raconté précédcmmcut dans un passage suspect du vingtième livre.

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