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388 CHAPITRE VII. — L'ART DANS L'ODYSSEE

langages humains nous permette de dire d'avance en quoi elles doivent consister essentiellement. On doit voir tomber en désuétude dans V Odyssée certaines formes encore florissantes dans Vlliade, et d'autre part on doit y assister à la naissance de mots nou- veaux, particulièrement de mots abstraits. C'est en effet ce qui a lieu.

Vlliade contient un certain nombre de formules qui remontaient évidemment à un temps plus ancien. Telle est par exemple la qualification de « bon et grand » [i^iq xe \Léyxq Te), appliquée à plusieurs héros. On a remarqué qu'elle revenait vingt-cinq fois dans V Iliade^ et trois fois seulement dans V Odyssée^. Le fait est d'autant plus remarquable qu'évidemment l'autorité de Vlliade devait avoir pour effet naturel de faire durer davantage de telles manières de parler. Le rare emploi qu'en fait VOdyssée prouve que cette autorité ne suffisait pas à réagir contre le mouvement naturel qui condamne à l'oubli les vieilles choses.

Les noms abstraits donnent lieu à des observations bien plus significatives encore. La langue homérique ne comprend qu'un nombre minime de substantifs servant à exprimer des états ou des qualités. On peut s'en rendre compte en parcourant un lexique spécial de cette langue et en remarquant combien il est rare d'y trouver à côté de Tadjectif le substantif dé- rivé. Toutefois Vlliade est bien plus pauvre à cet égard que VOdyssée. Sans vouloir dresser ici une statistique complète, nous croyons utile de donner pourtant quelques indications précises. Les termi- naisons qui servent à former le plus grand nombre de substantifs abstraits dans la langue homérique

1. Article de H. Collitz dans la Revue d'A. Kuhn, XXVII, 2, p. 18'f.

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