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SENTIMENTS RELIGIEUX ET MORAUX 505

gieuse, débordant d'une âme qui ne doute pas. Une chose entre toutes est pour lui certaine: ceux qui sont justes sont récompensés par les dieux et pros- pèrent, les violents et les parjures sont punis :

« Si quelqu*un sait ce qui est juste et parle selon ce qu'il sait, Zeus à la voix retentissante lui accorde le bonheur. Mais celui qui, à l'aide de faux témoignages, manque volontaire- ment à ce qu'il a juré, qui offense la justice et se rend grave- ment coupable, celui-là ne laisse après lui qu'une race obscure et infirme. Au contraire Thomme iidèlc à son serment a des fils qui prospèrent d'année en année *. »

Cette idée revient fréquemment dans les Travaux^ parce qu'elle est le fond même de la doctrine morale et religieuse d'Hésiode. Elle n'admet chez lui aucune hésitation ni aucune réserve, et de là le genre d'élo- quence qui lui est propre : c'est celle qui naît non de l'abondance des pensées, mais de la prédominance d'un principe unique obstinément imposé à l'atten- tion par une conviction qui ne se lasse jamais. Quelle est pour le poète la malédiction de l'âge de fer, c est-à-dire du sien? Justement le règne de la vio- lence et du parjure, le mépris brutal de la justice. Aussi avec quelle certitude n'en prévoit-il pas toutes les affreuses conséquences!

« Le père ne sera plus un père pour ses enfants, les fils ne seront plus des fils, l'hôte reniera l'hospitalité, les amis tra- hiront l'amitié, le frère cessera d'aimer son frère comme cela était autrefois. A peine vieillis, les parents seront insultés par leurs enfants, et ils entendront de leur bouche des paroles dures et des reproches. Plus de souci des dieux, plus de subsistance assurée aux vieux parents, partout le droit de la force, les villes pillées et détruites. Nul respect désormais du serment, ni de la justice, ni du bien ; ce sera l'homme malfai-

1. Travaux, v. 280-285.

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