La prose, qui apparaissait seulement à la fin de la période ionio-dorienne, se perfectionne rapidement dans la première moitié de la période attique. En même temps qu’elle devient un remarquable instrument d’analyse, elle se prête à tous les besoins d’un exposé qui tantôt se contente de précision et de clarté, tantôt vise à l’effet dramatique. L’histoire, sortant des mains des logographes, est agrandie par Hérodote et aussitôt après condensée par Thucydide. Le premier en fait un genre plein de vie, plein d’instruction curieuse et variée, et en outre naturellement dramatique. Le second, sans lui rien ôter de ce qu’elle avait d’émouvant chez son prédécesseur, enseigne une fois pour toutes aux esprits réfléchis à la considérer comme une école de raison et d’expérience. Après eux, elle reste comme une des études préférées de tous ceux que le spectacle des choses humaines intéresse. Xénophon et Ctésias, Éphore et Théopompe, pour ne citer que quelques noms illustres, la traitent selon la variété de leurs aptitudes personnelles : car elle invite à la fois ceux qui savent peindre et ceux qui se plaisent à juger.
L’éloquence, qui est aussi ancienne que la parole humaine, devient dans le même temps un genre littéraire, en ce sens qu’elle donne lieu à des œuvres écrites qui la préparent, lui viennent en aide ou la sauvent de l’oubli. Et peut-être, dans ce grand essor de la prose s’élevant au rang qu’abandonne alors la poésie, est-ce à elle surtout qu’il est donné de recueillir ce que celle-ci a laissé de passion ou d’imagination sans emploi. Si elle n’est guère qu’ingénieuse et savante chez les sophistes et chez Antiphon lui-même, elle est déjà vivante, variée, dramatique chez Lysias et Isée, humaine et personnelle chez Isocrate, puis elle s’affranchit tout à coup de