Aller au contenu

Page:Croiset - Histoire de la littérature grecque, t3.djvu/535

La bibliothèque libre.
Cette page n’a pas encore été corrigée

SES TENDANCES GÉNÉRALES 523

se posent à oous tout d*abord : elles sont aussi délicates qu'importantes. Pour apprécier l'œuvre, il faut aller jusqu'à Thommo, et malheureusement l'homme ne nous est en somme connu que par son œuvre. De là des di- vergences de jugements et des incertitudes, au milieu desquelles il est pourtant indispensable de chercher le plus possible de vérité *.

Tout satirique exagère quelquefois ses idées ; un poète de l'ancienne comédie les exagérait toujours ; nous avons expliqué plus haut ces nécessités du genre, il est inutile d'y revenir. Mais voici ce qu'il faut ajouter. Plus le poète avait le tempérament du genre, plus ces nécessités devenaient en lui vivantes et agissantes : ce n'était plus un calcul de l'esprit en vue d'un effet à produire, c'était une force intime, joyeuse et bouffonne, qui conduisait sa pensée et qui la dominait. Or Aristophane a été poète co- mique dès l'adolescence ; il est né pour la comédie, il en a eu le génie et le caractère. A vingt ans, il déborde de pétulance, d'audace, de fantaisie, d'humeur agressive. A-t-il alors des doctrines ? Est-il enrégimenté dans un parti politique ? Rien de moins probable. Et pourtant c'est à ses dix premières années de vie littéraire qu'appartien- nent ses œuvres les plus significatives ; à trente ans, il aura fait les Babyloniens et les Acharniens, les Chevaliers et les Nuées^ les Guêpes et la Paix ; que signifie cela ? Tout simplement peut-être qu'avec sa verve sarcaslique et sa clairvoyance exceptionnelle, ce gamin de génie se sent capable, dès le début, de quelque chose de grand. Il ne lui suffit pas de rire joyeusement, il est jaloux de

1. Outre les jugements qu*on trouvera dans les histoires littéraires, rappelons particulièrement ici ceux qui sont énoncés et discutés dans les ouvrages cités de MM. Denis et Gouat» et aussi dans les Études sur Aristophane de Deschanel (Paris, 1867) et dans Les deux masques de P. de Saint-Victor ; notons enfin l'article de Th. Kock (Rhelnisches Muséum, XXXIX, 1881), Aristophanes als Dkhter undPoH- tiker.

�� �