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ration du vraisemblable (τὸ εἰκος, mot sans cesse répété) ; ensuite celle des intentions, fondée sur le même principe : pourquoi l’aurais-je tué ? quelle vraisemblance dans l’accusation ? Tout cela d’une dialectique très fine, très serrée, et solidement appuyée sur une psychologie pénétrante. Qui donc a commis le crime ? Je l’ignore comme vous, dit l’accusé, et n’ai pas à le savoir. Le ton est vif, familier, plein de franchise : c’est le vrai style des affaires et de la vie réelle. Désormais la discussion principale est close ; la marche de l’orateur devient plus libre. Il touche successivement à trois points intéressants : d’abord la possibilité des erreurs judiciaires, un de ces très utiles et très efficaces lieux communs d’argumentation que nous avons déjà rencontrés dans les Tétralogies ; ensuite le passé apolitique de son père, qu’on lui reprochait, — autre argument de jury très fréquent à Athènes ; enfin la protection visible des dieux qui n’ont cessé de témoigner à maintes reprises en faveur de son innocence, — encore un genre d’argument que nous connaissons en principe.

La péroraison résume les principaux arguments, puis revient à des idées générales analogues à celles de l’exorde. On y trouve notamment un beau lieu commun sur les conséquences de l’arrêt à intervenir[1], morceau qui sera répété par Antiphon lui-même dans le plaidoyer Sur le Choreute, mais à une autre place, au début du discours[2].

L'étude des deux autres plaidoyers (Sur le Choreute, Accusation d’empoisonnement contre une belle-mère) ne nous apprendrait rien de plus sur l’art d’Antiphon. On a quelquefois mis en doute l’authenticité du dernier. Mais les raisons invoquées sont vraiment très faibles[3].

  1. Paragr. 87-89.
  2. Paragr. 3-5.
  3. Cf. Blass. Attische Beredsamkeit, I, p. 182. Wilamowitz-Mœllendorff (Hermès, XXII, p. 194, sqq.) s’est prononcé pour l’authenticité.