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CHAP. VIII. — LA FIN DE L’HELLÉNISME


au moins laisse entrevoir l’intérêt. Apres lui, cette spécialité ne demandait qu’à être cultivée pour grandir. Par malheur, elle était venue au monde trop tard ; le développement qu’elle attendait lui manqua.

Négligée, à ce qu’il semble, dans toute la seconde moitié du ive siècle, l’histoire ecclésiastique ne reprend faveur qu’au ve siècle. Il se trouve alors tout un groupe d’écrivains qui procèdent d’Eusèbe, et qui entreprennent de continuer son œuvre. Tous traitent à peu près le même sujet ; ils racontent l’histoire de l’Église sous Constantin et ses fils, sous Julien, Jovien, Valentinien, sous Théodose et ses fils, et ils la conduisent en général jusque vers le tiers du ve siècle. Ce qu’ils retracent, c’est donc l’établissement définitif du christianisme, sa victoire, et aussi la lutte de l’arianisme et de l’orthodoxie. Sujet bien fait assurément pour les inspirer, puisqu’il leur donnait à mettre en scène de grands événements, des conflits d’idées et de passions, des spectacles dramatiques, des hommes supérieurs, et qu’il leur fournissait encore le moyen de rassembler tous ces éléments d’intérêt dans une unité simple et naturelle. Mais c’est justement la beauté du sujet qui révèle leur insuffisance.

Entre leurs mains, l’œuvre ébauchée par Eusèbe ne fait pas de progrès. Narrateurs estimables, honnêtes, assez bien informés, écrivains médiocres, ils ne sont pas plus philosophes que lui. Les grandes choses leur échappent. Ils ne voient ni les causes profondes ni les conséquences lointaines. Ce sont des prêtres, des avocats, quelquefois des moines, jamais des hommes d’État. Tout se réduit pour eux à une série de détails, à des questions de dogme ou de discipline, à des faits sans portée, à la prédominance de certains hommes ou de certains partis. Leur avantage sur les historiens profanes du même temps, c’est qu’ils sont moins rhéteurs et