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THÉODORET


ciles et qui sont devenues celles de l’orthodoxie. Son rôle dans l’histoire du christianisme est donc très grand. On n’impose pas ainsi ses opinions aux hommes sans les dominer par quelques hautes qualités. Les siennes étaient la netteté de l’esprit, la logique, la force de la volonté, la conviction. Personne au ve siècle n’est plus près que lui des grands évêques du ive, d’Athanase surtout ; et toutefois on ne peut dire qu’il soit tout à fait leur égal. Comme homme d’action, il n’a pas eu à déployer toutes les qualités exceptionnelles d’Athanase. Comme orateur, il n’a ni la gravité noble et douce de Basile, ni la grâce brillante de Grégoire de Nazianze, ni l’éloquence pleine, animée, tantôt touchante, tantôt mordante, de Chrysostome. Il est plus homme d’école ; il n’a ni le même naturel ni le même instinct de la beauté. Son style a de la force et s’éclaire assez fréquemment d’images justes et frappantes ; mais il est abstrait, artificiel, chargé d’expressions techniques ; chose curieuse, il rappelle celui d’Origène et de Clément, autant ou plus que celui de ses devanciers immédiats.

Théodoret, avec d’autres qualités d’esprit, est loin d’avoir, dans l’histoire religieuse du temps, la même importance que Cyrille[1]. Il n’a attaché son nom à l’établissement d’aucun dogme, il n’a remporté aucune victoire d’opinion ; il est seulement le dernier des grands docteurs de l’Église d’Orient.

Né vers 386 à Antioche, Théodoret put entendre encore, dans son enfance, la parole de Chrysostome et celle de Théodore de Mopsueste. Mais il est impossible

  1. Renseignements biographiques dans les historiens ecclésiastiques et dans plusieurs passages de Photius (voir l’Index de l’éd. Bekker). Pour la bibliographie moderne, consulter Bardenhewer, Patrol., § 60 ; voir, en particulier, l’Historia Theodoreti du Père Garnier dans son édition de Théodoret.