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CHAPITRE IV. — LA POÉSIE ALEXANDRINE

Colophon, avait ouvert cette voie nouvelle dès le début du ive siècle[1] ; mais ce n’était là encore qu’une exception, qu’une tentative isolée, presque prématurée : Philétas eut le mérite de discerner avec finesse ce qui convenait au goût de son temps, et de là vint son influence durable, accompagnée d’une gloire dont nous ne saisissons plus que le lointain écho.


Hermésianax de Colophon, qui fut son ami et son disciple[2], avait composé un poème épique intitulé Les Persiques (Περσικά[3]), et trois livres d’élégies auxquels il avait donné le nom de sa maîtresse. Léontium, à l’imitation de la Lydé d’Antimaque. Des Persiques, nous ne savons à peu près rien[4]. La Léontium nous est beaucoup mieux connue, grâce à quelques indications éparses, et surtout à un long fragment du iiie livre, cité par Athénée[5]. Les indications relatives aux deux premiers livres nous montrent qu’Hermésianax y racontait, en poète érudit et bel esprit, une foule de légendes amoureuses[6]. Le fragment du iiie livre nous permet de mieux saisir encore la nature de son inspiration et la qualité de son talent. L’idée du morceau est que tous les poètes sont amoureux. Hermésianax démontre sa thèse par une longue énumération des plus célèbres amours attribuées à des poètes. C’est de fort mauvais, mais aussi fort caractéristique alexandrinisme, avec la plupart des défauts essentiels de l’époque : absence complète de composition, froideur glaciale du sentiment,

  1. Cf. t. III, p. 663 (674, 2e édition).
  2. Schol. Nicandre, Thériaques, 3. Cf. la manière dont Hermésianax parle de Philétas dans le fragment cité par Athénée (598, F).
  3. Schol. Nicandre, ibid.
  4. V. dans Couat, p. 80-84, quelques conjectures intéressantes.
  5. Athénée, XIII, p. 597, A, et suiv.
  6. Cf. Couat, p. 81-85.