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VUE D’ENSEMBLE

est trop visible qu’elle ne tient à rien, qu’elle ne naît point du sol, qu’elle est le produit éphémère d’une élaboration de lettrés. Elle aboutit tout naturellement à la poésie de cour du vie siècle, à celle des Agathias et autres beaux-esprits du temps de Justinien, pour aller se perdre au delà, sans interruption apparente, dans la versification bavarde des Byzantins. Seule, la philosophie fait encore quelque figure au ve siècle, avec Proclos et l’école d’Athènes. C’est vraiment le dernier reste de l’hellénisme. Mais cette philosophie même tourne de plus en plus au commentaire. Elle vit du passé, qu’elle ne renouvelle qu’en apparence, et qu’elle cesse bientôt tout à fait de renouveler. Elle se prolonge ainsi à travers tout le vie siècle, et au delà, — même après la fermeture officielle de l’école d’Athènes en 529, — par les commentateurs attitrés d’Aristote et de Platon, qui se passent de main en main la chaîne de la tradition. Puis, peu à peu, vers le viie siècle, cet enseignement stérile cesse de trouver des disciples ; les derniers tenants de l’hellénisme ont disparu.

De son côté, la littérature chrétienne, qui aurait pu sembler appelée à de meilleures destinées, n’a guère un sort plus brillant. Elle est entraînée, elle aussi, dans la décadence générale. N’ayant pas su se faire un art qui lui fût propre, elle voit décliner celui qu’elle a emprunté, à mesure que décline l’hellénisme lui-même. Au ve siècle, elle compte encore des historiens de quelque valeur relative, bien que dénués d’originalité, un Socrate, un Sozomène, un Théodoret, et plusieurs autres ; au vie siècle, elle n’a plus, sauf Évagrios, que des moines chroniqueurs et compilateurs, sans idées, sans critique, sans art, dont la série va se prolonger à travers le moyen-âge byzantin. L’homilétique, qui avait fait sa gloire au ive siècle, tombe très vite, elle aussi, après Chrysostome ; sans cause apparente, par impuissance