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CHAP. IV. — SOPHISTIQUE SOUS LES ANTONINS

œuvre, et c’est par là qu’elle se rattache à la sophistique contemporaine. Mais, d’autre part, on voit assez, par tout ce qui précède, à quel point elle la dépasse. La mode dont il avait profité a pu disparaître sans lui faire de tort : il est resté, comme un des grands représentants du bon sens satirique, comme un des maîtres toujours admirés de la raillerie.

IX

Du nom de Lucien, il est naturel de rapprocher, — sans méconnaître d’ailleurs les distances, — celui d’Alciphron, fantaisiste aimable comme lui, qui fut probablement son contemporain, et qui semble s’être quelquefois inspiré de lui. Le recueil de Lettres qu’il nous a laissé est une des plus agréables productions de la sophistique du second siècle[1].

Alciphron, dont nous ignorons entièrement la vie, semble avoir écrit dans la fin du second siècle. Eustathe (762, 62) le qualifie d’Atticiste, et tous ses caractères le rattachent en effet à ce goût d’atticisme délicat et savant qui se manifeste alors. Aristénète, dans le recueil de Lettres fictives qu’il publia au ve siècle, a supposé une lettre d’Alciphron à Lucien (I, 5) et une autre de Lucien à Alciphron (I, 22). Ces deux lettres nous les représentent comme deux amis, également enclins à s’amuser du spectacle des choses du jour, qui se racontent l’un à l’autre, en fins narrateurs, les petits faits de la chronique galante d’Athènes. Il y a tout lieu de croire qu’Aristénète, bien informé, nous a donné en cela une idée juste des relations des deux écrivains. Alciphron a

  1. Sur Alciphron, voir l’art. de Passow dans l’Encyclopédie d’Ersch et Gruber (Cf. Vermischte Schriften, p. 91 et suiv.), et celui de W. Schmid, dans l’Encyclop. de Pauly-Wissowa.