Page:Cromarty - K.Z.W.R.13, 1915.djvu/164

La bibliothèque libre.
Cette page a été validée par deux contributeurs.

— Sa sœur, vous voulez dire, riposta le Sullivan de contrebande.

— Enchantée, monsieur, répliquait mistress Trubblett, en minaudant. Enfin, se dit-elle, voilà donc un gentleman, mais ce français !… Quand je pense que ma fille veut épouser cet écervelé !!

— Ces dames veulent-elles se débarrasser ?

C’était une femme de chambre qui ouvrait la porte du petit salon précédant le vestiaire, où les femmes pouvaient laisser leurs vêtements de dessus, manteaux et fichus de dentelles.

Tandis que Ketty et sa mère la suivaient, Stockton disait à Marius :

— Comment se fait-il que vous soyez sorti ?

— Ah, ça n’a pas été de mon plein gré, mais ces dames m’ont fait demander par téléphone, alors j’ai sauté dans un auto et j’ai été les chercher. Je vous réponds, que je n’ai pas perdu de temps, j’en ai chaud !

Tout en parlant sur le seuil du vestiaire des hommes, Marius sortait un mouchoir de la poche de son pardessus et s’épongeait le front, quand son ami, qui le regardait attentivement depuis un instant, poussa une sourde exclamation et lui saisissant la main :

— Avec quoi vous essuyez-vous le front ?

— Avec mon mouchoir.

— Avec votre mouchoir ! Regardez le donc !

Et Stockton le lui prenant des mains, lui montrait un mouchoir avec une bordure violette : vite, ils regardèrent le chiffre, ils virent ces deux lettres entrelacées et brodées en violet G. W.

Le mouchoir volé à Weld, s’écria Marius !

— Mais comment est-il entre vos mains

— Je ne sais. Il devait être dans la poche de mon pardessus. Mais ce pardessus n’est pas le mien !

En effet, la couleur de celui qu’il avait au dos était celle du vêtement de demi-saison qu’il avait remis au chasseur du Carlton, la coupe en était identique, les étoffes, tout en se ressemblant beaucoup, à première vue, différaient quelque peu.

Stockton, sans mot dire, entraîna Marius dans le vestiaire et là, notre policier-amateur reconnut, non sans surprise, son paletot encore accroché à une patère.

— Mais le voilà, mon pardessus ! Mais alors.

— Celui que vous avez au dos ?

— Oui.

— Vous ne devinez pas, voyons ce n’est pas bien difficile. Les clients ne sont pas nombreux au Carlton à cette heure-ci.

— Borchère ?

— Lui-même.

— Mais alors, c’est Borchère qui serait le voleur de Weld, l’assassin de Jarvis ?

— N’allons pas trop vite. Et d’abord ôtez ce pardessus et remettons bien en place, à la patère où se trouve déjà le chapeau de monsieur le comte… Attendez…

Et tout en parlant, Stockton débarrassait son ami et visitait consciencieusement les poches du vêtement.

— Rien d’autre !

— Je comprends ce qui a dû se passer. Le chasseur, lorsque je suis parti en coup de vent, tout à l’heure, a dû, par erreur, me tendre le paletot de Borchère, et, voyez le hasard, celui-ci contenait précisément le mouchoir volé à Weld dans l’une de ses poches.