Page:Cultru - Un empereur de Madagascar au XVIIIe siècle - Benyowszky.djvu/91

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et bien loin de pouvoir confier la moindre idée de mes projets à personne, je dois, au contraire, les tenir secrets : heureusement, ma constitution naturelle a vaincu toutes les fatigues et tous les maux. »

Il ressortait évidemment de ces lettres écrites dans les premières semaines de septembre 1774, qu’en quelques mois seulement Madagascar avait été exploré presque complètement, en partie même occupé ; une route était ouverte entre la côte orientale et l’autre, 32 provinces soumises, des revenus assurés, tout, enfin, préparé pour l’établissement d’une véritable colonie. Que l’on se mette à la place des ministres auxquels ces rapports étaient destinés, qu’on se les représente, habitués à l’exactitude paperassière des employés français, persuadés qu’un homme qui cite des chiffres et qui énonce des faits ne ment point, parce que les contrôles multipliés d’une administration savante lui rendent le mensonge dangereux, presque impossible ; il n’est pas admissible que de telles assertions aient provoqué le moindre doute. Il manquait au comte de Boynes, comme au duc d’Aiguillon, d’avoir une certaine connaissance des lieux ; elle leur eût, dès le premier mot, fait apercevoir l’invraisemblance des exploits trop brillants, des explorations trop rapides, des conquêtes merveilleuses faites en son fauteuil par l’aventurier hongrois.

Il n’eut garde de démentir ces admirables commencements et sut mettre dans sa correspondance la progression nécessaire. Il écrivit le 16 mars 1775 : « C’est avec le plus grand plaisir que j’ai l’honneur de vous rendre les comptes sur cet objet (le passage allant à la côte ouest) pour lequel j’ai été si violemment contrecarré par l’île de France. Après avoir reçu la domination de la province d’Angontsy, située à l’est et au nord de l’île, et du chef-lieu, je me suis porté à la pointe la plus nord, nommée cap d’Ambre. Le chef de ce riche pays, nommé Lambouin, ayant eu la guerre avec les Seclaves, peuples très aguerris, qui habitent sur les côtes de l’ouest