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ment que par conduction, est d’autant plus grande que la quantité de cette énergie accumulée dans le corps est plus considérable. On comprend alors qu’un équilibre de régime s’établit nécessairement, l’énergie radioactive accumulée dans le corps allant en augmentant jusqu’à ce que la double perte dont nous venons de parler compense l’apport continu fait par le radium.

On peut considérer cette manière de voir comme analogue à celle qui est en usage dans l’étude des phénomènes calorifiques. Si, dans l’intérieur d’un corps, il se fait, par une cause quelconque, un dégagement continu et constant de chaleur, la chaleur s’accumule dans le corps et la température s’élève jusqu’à ce que la perte de chaleur du corps par rayonnement et par conduction fasse équilibre à l’apport continu de chaleur.

En poursuivant cette analogie, il y aurait lieu de considérer une tension de radioactivité analogue à la température, et caractérisée par l’intensité du rayonnement (que nous avons considéré jusqu’ici comme donnant la mesure de l’intensité de la radioactivité). On pourrait aussi définir une capacité de radioactivité analogue à la capacité calorifique.

La théorie qui précède permet d’interpréter diverses expériences :

En général, excepté dans des conditions spéciales, l’activité ne se communique pas de proche en proche à travers les corps solides. Lorsqu’on conserve une dissolution en tube scellé, la perte par rayonnement subsiste seule, et l’activité radiante de la dissolution prend une valeur très élevée. Si, au contraire, la dissolution se trouve dans un vase ouvert, la perte d’activité de proche en proche par conduction devient considérable, et, lorsque l’état de régime est établi, l’activité radiante de la solution est très faible.

Remarquons encore que l’activité radiante d’un corps radioactif solide laissé à l’air libre ne diminue pas sensiblement, parce que, la propagation de la radioactivité par conduction ne se faisant pas à travers les solides, c’est seulement une couche superficielle extrêmement mince qui produit la radioactivité induite. On constate, en effet, que la dissolution du même sel produit des phénomènes de radioactivité induite beaucoup plus intenses (20 fois