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RECHERCHES SUR LES SUBSTANCES RADIOACTIVES.

ment donné, il faut, d’une part, faire absorber intégralement ce rayonnement par le gaz, en employant une masse absorbante suffisante ; d’autre part, il faut utiliser pour la production du courant tous les ions créés, en établissant un champ électrique assez fort pour que le nombre des ions qui se recombinent devienne une fraction insignifiante du nombre total des ions produits dans le même temps, qui sont presque tous entraînés par le courant et amenés aux électrodes. Le champ électrique moyen nécessaire pour obtenir ce résultat est d’autant plus élevé que l’ionisation est plus forte.

D’après des recherches récentes de M. Townsend, le phénomène est plus complexe quand la pression du gaz est faible. Le courant semble d’abord tendre vers une valeur limite constante quand la différence de potentiel augmente ; mais, à partir d’une certaine différence de potentiel, le courant recommence à croître avec le champ, et cela avec une rapidité très grande. M. Townsend admet que cet accroissement est dû à une ionisation nouvelle produite par les ions eux-mêmes quand ceux-ci, sous l’action du champ électrique, prennent une vitesse suffisante pour qu’une molécule du gaz, rencontrée par un de ces projectiles, se trouve brisée et divisée en ses ions constituants. Un champ électrique intense et une pression faible favorisent cette ionisation par les ions déjà présents, et, aussitôt que celle-ci commence à se produire, l’intensité du courant croît constamment avec le champ moyen entre les plateaux[1]. Le courant limite ne saurait donc être obtenu qu’avec des causes ionisantes, dont l’intensité ne dépasse pas une certaine valeur, de telle façon que la saturation corresponde à des champs pour lesquels l’ionisation par choc des ions ne peut encore avoir lieu. Cette condition se trouvait réalisée dans mes expériences.

  1. Townsend, Phil. Mag., 1901, 6e série, t. I, p. 198.