Page:Curwood - Kazan, trad. Gruyer et Postif.djvu/147

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crissement d’acier des patins de traîneau sur la neige gelée, parvint faiblement aux oreilles de Kazan et à celles de Louve Grise assoupis,

À la première perception de ce bruit mystérieux des cieux arctiques, ils cessèrent de dormir et se mirent sur le qui-vive, méfiants et les oreilles alertées.

Ils revinrent, en trottant, vers la viande qu’ils avaient tuée. Ils avaient combattu ensemble pour l’abattre, et n’ignoraient pas qu’elle leur appartenait seulement par le droit du croc. C’était la loi du Wilderness qu’ils auraient à lutter encore pour la conserver. Au temps des beaux jours de chasse, ils auraient, sans plus, continué leur route sous la lune et sous les étoiles. Mais les longues journées de jeûne et les nuits de famine les avaient rendus plus prévoyants.

Leur crainte n’était point vaine. Profitant de la beauté paisible de la nuit, qui venait après tant d’autres, si terribles, des milliers, des centaines de milliers de créatures affamées du Wild sortaient de leurs retraites pour quérir une nourriture. Sur dix-huit cents milles de l’est à l’ouest, sur un millier de milles du sud au nord, des légions d’êtres efflanqués, au ventre plat, se mettaient en chasse, dans la nuit claire. L’instinct disait à Kazan et à Louve Grise que cette grande chasse de la création était commencée, et pas un instant ils ne cessèrent de monter la garde. Tapis sous un buisson, ils observaient, Louve Grise léchant amoureusement la tête de Kazan.

Soudain, ils tressaillirent et leurs muscles se raidirent. Quelque chose de vivant avait passé près d’eux, quelque chose que Kazan n’avait pu voir, que Louve Grise n’avait pu entendre, mais qu’ils avaient faiblement perçu dans l’air.

C’était un gros hibou blanc qui, mystérieux comme une ombre, impalpable et silencieux comme un flocon de neige, était descendu dans l’atmosphère.