Page:Curwood - Kazan, trad. Gruyer et Postif.djvu/152

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Sans se soucier de ses avertissements, il s’avança, à pas légers, la tête haute, l’échine hérissée, vers les nouveaux arrivants. Son flair, au contraire de celui de Louve Grise, lui enseignait pour eux la sympathie.

Il s’arrêta à une vingtaine de pas du petit groupe, qui s’était accroupi dans la neige.

Le panache de sa queue commença à s’agiter, tandis qu’une des bêtes s’était levée d’un bond et s’approchait de lui. Les autres firent de même et, l’instant d’après, Kazan était au milieu du groupe. On se flairait et se reflairait mutuellement, avec tous les signes évidents de la satisfaction. Les nouveaux venus n’étaient pas des loups. C’étaient des chiens.

En quelque cabane isolée de la solitude glacée, leur maître était mort. Alors ils étaient partis dans le Wild.

Ils portaient encore les marques des harnais de traîneaux auxquels ils avaient été attachés. Autour de leurs cous étaient des colliers en peau d’élan. Sur leurs flancs pelés, les poils étaient ras et usés, et l’un d’eux traînait encore après lui un trait de trois pieds de long. À demi claqués de faim, ils étaient maigres sinistrement. Leurs yeux luisaient, rougeâtres, dans leurs orbites creuses.

Aimablement, Kazan trotta devant eux et les amena devant le corps du vieil élan. Puis il alla rejoindre Louve Grise et, tout fier et satisfait, s’assit près d’elle, en écoutant la mastication des mâchoires des pauvres bougres qui festoyaient. Et, comme Louve Grise semblait toujours inquiète, il lui donna, de la langue, une rapide caresse, afin de l’assurer que tout allait bien.

Leur repas terminé, les chiens s’en vinrent vers Kazan et vers Louve Grise, afin de nouer plus ample connaissance. La louve aveugle parut surtout les intéresser, et ils la reniflèrent sur toutes ses faces. Cette familiarité déplut à Kazan, qui commença à surveiller de près ces effrontés.