Page:Custine - La Russie en 1839 troisieme edition vol 1, Amyot, 1846.djvu/148

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bien ennuyeuse. Sans cette campagne d’hiver, les habitants du rivage languiraient auprès de leurs poêles, sous leurs pelisses de peau de mouton retournées. L’affluence des baigneurs sur cette belle plage sert aux paysans de la rive à gagner, pendant l’été, de quoi suffire à leurs premiers besoins, pour tout le reste de l’année, sans s’exposer à tant de périls et de fatigues ; mais où il n’y a que le nécessaire, il n’y a rien. Parmi les hommes de Travemünde, la pêche d’hiver représente le superflu ; les dangers gratuits qu’ils affrontent pendant cette rude saison servent à leur élégance : c’est pour une bague à son doigt, pour des boucles à ses oreilles, pour une chaîne d’or au cou de sa maîtresse, pour une cravate de soie éclatante ; c’est pour briller enfin, et pour faire briller ce qu’il aime, ce n’est pas pour manger qu’un pêcheur de Travemünde lutte, au péril de ses jours, contre les flots et les glaces ; il n’affronterait pas cet inutile danger s’il n’était une créature supérieure à la brute, car le besoin du luxe tient à la noblesse de notre nature, et ne peut être dompté que par un sentiment encore plus noble.

Ce pays me plaît, malgré son aspect uniforme, La végétation y est belle. Au 5 juillet, la verdure me paraît fraîche et nouvelle ; les seringats des jardins commencent à peine à fleurir. Le soleil, sous ces climats paresseux, se lève tard, en grand sei-