Page:Custine - La Russie en 1839 troisieme edition vol 1, Amyot, 1846.djvu/18

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que ce voyage a été fait de deux manières : d’abord jour par jour, ou plutôt nuit par nuit ; l’écrivain nous apprend qu’il notait pour lui et ses amis les faits qui le frappaient, et les impressions qu’il en recevait ; le livre entier, avec les réflexions qui le grossissent, était contenu en germe dans cette espèce de journal. C’est ce qu’il pourrait prouver en communiquant les originaux de ses lettres à ceux qui doutent qu’il ait vu en si peu de temps tout ce qu’il décrit ; trois ans plus tard il s’est imposé pour le public un minutieux travail de rédaction. La combinaison singulière qui résulte de ces deux manières, de ces deux époques, l’incohérence produite par le mélange d’impressions spontanées et d’expressions réfléchies, expliquent les critiques aussi bien que les éloges dont ce livre a été l’objet. Loin d’avoir forcé les couleurs et exagéré le mal, le voyageur a passé sous silence une foule de faits avérés et bien plus révoltants que ceux qu’il a rapportés ; il craignait de ne pouvoir faire croire à ses récits. La peinture qu’il a faite des Russes et de leur gouvernement est donc un portrait ressemblant, mais dont les traits sont adoucis ; il a poussé le scrupule et l’impartialité jusqu’à négliger tous les faits et toutes les anecdotes qui lui avaient été confiés par les Polonais.

Nous terminons en citant ce que l’auteur répond aux ennemis acharnés que lui a faits son imprudente passion pour la vérité : « Si les faits que je raconte sont faux, qu’on les nie ; si les conséquences que j’en tire sont